Les recommandations du HCSF – Haut Conseil de Stabilité Financière – vont s’imposer aux acteurs du crédit immobilier et elles seront traduites dans une norme juridiquement contraignante dès septembre 2021.
Cela pourrait profondément remettre en cause le financement de l’immobilier locatif et donc le dynamisme et l’évolution positive des prix de l’immobilier de rendement.
Dans sa définition du taux d’endettement, le HCSF exclut la possibilité pour les banques d’utiliser le calcul différentiel encore utilisé jusqu’à récemment par certains établissements bancaires.
Les quelques banques qui acceptaient encore ces méthodes de calcul particulièrement favorables sont en train d’ajuster leur logiciel interne pour rentrer dans le rang des exigences du HCSF.
Et n’espérez pas utiliser la SCI imposée à l’impôt sur le revenu pour contourner ces règles, cela ne fonctionne pas car le taux d’endettement est calculé sans tenir compte de cette interposition. Le HCSF utilise les revenus déclarés à l’impôt sur le revenu pour calculer le taux d’endettement ; ainsi, la semi-transparence de la SCI ne permet donc pas de contourner cette règle de calcul.
Quant aux SCI à l’IS, il s’agit d’une possibilité dont les inconvénients dépassent largement les avantages lorsqu’il s’agit d’investir dans un bien immobilier locatif dont la valeur pourrait s’apprécier à long terme.
De surcroît, même pour les SCI à l’IS le financement est de plus en plus compliqué à obtenir. Les normes d’appréciation du crédit professionnel appliquées aux SCI à l’IS sont loin d’être aussi favorables que celles applicables aux crédits immobiliers.
Pourquoi la fin du calcul du taux d’endettement différentiel va compliquer l’investissement immobilier locatif ?
Prenons la situation suivante :
Monsieur X est locataire. Il paye 800 € de loyer mensuel ; son revenu est de 3,000 € net par mois.
Il souhaite investir dans un immeuble locatif d’une valeur de 300,000 € qui génèrera un revenu de 1,500 € par mois (soit un rendement net de 6 % et donc un rendement brut autour de 8 % à 9 % – typiquement un bien immobilier de rendement).
Un crédit de 300,000 € sur 25 ans au taux, assurance comprise, de 1.30 %, donne une mensualité de 1,171 €.
Un cash-flow entre loyer et mensualité de crédit qui donne l’impression d’un effort d’épargne nul voire négatif.
Calcul du taux d’endettement pour ce candidat à l’investissement immobilier locatif :
- Méthode de calcul du taux d’endettement selon les critères du HCSF : (loyer + mensualité du crédit immobilier) / (revenu professionnel + 70% du revenu immobilier locatif) ; (800+1171)/(3000+1500*0.70) = 48% ! Avec un taux d’endettement à 48%, le projet immobilier locatif n’est pas finançable.
- Méthode de calcul du taux d’endettement selon la méthode du calcul différentiel : (loyer) / (revenu professionnel – (mensualité du crédit immobilier – 70% du loyer brut ) = 800 / (3000 -121.82) = 26% ! Avec un taux d’endettement à 26% ce projet immobilier locatif est finançable.
Aujourd’hui, le calcul différentiel est proscrit par le HCSF – Et les banques qui l’appliqueraient pourraient être sanctionnée à partir de septembre 2021.
Malheureusement, malgré ce fameux cash-flow positif, et donc cet effort d’épargne nul, le projet n’est plus finançable pour ce candidat locataire.
Prenons un second exemple avec un candidat propriétaire de sa résidence principale, même revenus et même projet d’investissement.
Calcul du taux d’endettement pour ce candidat à l’investissement immobilier locatif :
- Méthode de calcul du taux d’endettement selon les critères du HCSF : (mensualité du crédit immobilier) / (revenu professionnel + 70% du revenu immobilier locatif ) ; (1171)/(3000+1500*0.70) = 28% ! Avec un taux d’endettement à 28%, le projet immobilier locatif est finançable car inférieur à 33%.
- Méthode de calcul du taux d’endettement selon la méthode du calcul différentiel : (charge de crédit immobilier) / (revenu professionnel – (mensualité du crédit immobilier – 70% du loyer brut ) = 0 / (3000 -121.82) = 4% ! Avec un taux d’endettement à 4% ce projet immobilier locatif est finançable.
Notre candidat à l’investissement immobilier locatif est finançable car il est propriétaire de sa résidence principale et n’a plus de charge de remboursement.
Ainsi, apparaît qu’il va devenir de plus en plus compliqué de se lancer dans l’immobilier locatif pour ceux qui seraient locataires ou qui n’auraient pas encore remboursé le crédit de leur résidence principale.
La raréfaction des investisseurs dans l’immobilier locatif de rendement va peser sur la liquidité du marché et donc sur les prix de l’immobilier de rendement.
Bien que se faisant sentir depuis quelques mois déjà, la fin du calcul du taux d’endettement différentiel devrait de plus en plus peser sur le dynamisme du marché immobilier locatif et notamment pour l’immobilier de rendement.
Ce durcissement des conditions d’octroi des crédits immobiliers pour les investisseurs en immobilier locatif devrait naturellement peser sur la demande car les investisseurs finançables (revenus élevés et ayant déjà remboursé leur crédit résidence principale) deviennent plus rares.
En effet, contrairement à l’immobilier « patrimonial », l’immobilier de rendement n’intéresse que les investisseurs et en aucun cas les acheteurs de résidence principale.
Un marché, c’est la confrontation d’une offre et d’une demande.
Lorsque la demande baisse (car les candidats investisseurs ne trouvent pas de financement bancaire) dans un contexte d’offre constante… les délais de vente s’allongent et les prix baissent.