Le lancement par Donald Trump d’une plateforme dédiée aux cryptomonnaies soulève des préoccupations concernant un éventuel conflit d’intérêt dans ce secteur.
Le retour de Trump à la Maison Blanche est perçu comme une opportunité par de nombreux acteurs du marché des crypto-monnaies, qui envisagent une redynamisation des États-Unis sur ce marché mondial. En juillet, bien qu’il ait longtemps été un opposant de cette technologie, Trump a promis à un public d’initiés de faire des États-Unis « la capitale mondiale des cryptos ».
Durant la campagne électorale, des groupes de soutien proches de l’univers des crypto-monnaies ont collecté environ 245 millions de dollars, dont une grande partie a servi à cibler les opposants démocrates au secteur. Selon le Washington Post, dès son élection, Trump aurait déjà commencé à chercher des profils compatibles avec le milieu des crypto-monnaies pour des postes-clefs au sein de son futur gouvernement.
Parallèlement, certains membres de son équipe enquêteraient sur les attentes du secteur en matière de régulation. Le retour de Trump à la présidence semble avoir dopé la valeur du bitcoin.
Trump a évincé dès son investiture Gary Gensler, le président de la SEC, un adversaire acharné des crypto-monnaies. Ce dernier, ancien banquier, avait adopté une approche répressive, considérant les cryptos comme des titres financiers classiques et lançant plusieurs poursuites contre les plateformes majeures comme Binance, Coinbase et Kraken.
Cette absence de régulation claire a non seulement freiné l’innovation, mais aussi poussé plusieurs sociétés à s’installer dans des pays au cadre législatif plus favorable. Selon Katherine Snow, responsable juridique de Thesis, développeur d’applications basées sur Bitcoin, cela a eu un effet néfaste sur l’innovation.
Une solution pourrait résider dans la loi FIT21, adoptée par la Chambre des représentants, qui redonne un rôle prééminent à la CFTC, un régulateur plus flexible et pragmatique.
Selon Simon Peters, analyste d’eToro, la clarification du statut de certains actifs crypto pourrait accélérer l’introduction de nouveaux produits financiers, attirant davantage de capitaux.
Chandra Duggirala, dirigeant de Tides Network, espère que la politique de Trump offrira une rupture par rapport à celle de Joe Biden, perçue comme défavorable aux crypto-monnaies. Il évoque notamment les pressions exercées sur les banques pour qu’elles évitent de collaborer avec des entrepreneurs de la blockchain.
Le monde des monnaies numériques, longtemps stigmatisé comme un terrain de spéculateurs ou de criminels, attend de Trump qu’il permette la normalisation de ce secteur.
Un conflit d’intérêt possible
Michael Cahill, à la tête de Douro Labs, une société de collecte de données financières, est convaincu que l’engagement de Trump en faveur des cryptomonnaies est renforcé par ses propres investissements dans ce domaine.
En septembre, Trump et ses trois fils ont lancé World Liberty Financial, une plateforme de placement et d’emprunt en crypto monnaie, en collaboration avec des figures du secteur. Cette initiative soulève des questions sur un possible conflit d’intérêt, car des politiques favorables aux crypto-monnaies pourraient directement profiter à cette jeune entreprise.
Les responsables de la plateforme Coinhouse estiment que le gouvernement Trump pourrait également favoriser les paiements en stable coins, des cryptomonnaies moins volatiles car adossées à d’autres devises, souvent le dollar.
Légitimer les cryptomonnaies pourrait aussi inclure l’idée de constituer des réserves nationales de bitcoins, comme l’a suggéré Trump en juillet. Kath, une spécialiste du secteur, souligne que l’adoption proactive de ces actifs numériques permettrait aux États-Unis de définir les normes internationales et la stratégie globale face aux crypto-monnaies.
Selon Simon Peters, le gouvernement détient déjà environ 210,000 bitcoins, provenant majoritairement de saisies judiciaires, représentant près de 18 milliards de dollars.
Pour Katherine Snow, conserver ou renforcer ces réserves serait un signal fort en faveur de l’innovation, attirant ainsi des investissements et des talents.